TocCyclopédie ■ Époques

Fut un temps où dans les couloirs de nos lycées, nous préférions nous refiler des bouquins que des cartes à jouer... C'est ainsi que je me suis retrouvé avec "La Couleur Tombée du Ciel" entre les mains.




L'homme

Qui êtes-vous ? Âge, origine (géographique et culturelle)
Olivier Piechaczyk, je suis né en région parisienne, en 1962.
Votre lit est-il une couche de varech géant ou plutôt du genre roche en fusion ?
Quand je pionce, je pionce ! Maintenant si quelqu'une veut me faire goûter aux joies du waterbed, je n'y verrais aucun inconvénient...
Est-il vrai que Jean Balczesak est un profond & Didier Guiserix une goule ?
Je n'ai rencontré Didier qu'une ou deux fois et très rapidement. Son haleine était fraîche...
Jean est profond, ouais ! Profondément humain ! J'ai rarement accroché aussi rapidement avec quelqu'un. Ce qui m'impressionne le plus chez lui, c'est son immense culture et son ouverture d'esprit.
Comment avez-vous découvert Lovecraft ?
Fut un temps où dans les couloirs de nos lycées, nous préférions nous refiler des bouquins que des cartes à jouer... C'est ainsi que je me suis retrouvé avec "La Couleur Tombée du Ciel" entre les mains. J'ai aussitôt dévoré le reste de l'œuvre du grand HPL. Une véritable boulimie ! Mais je ne me suis pas focalisé sur Lovecraft ; de Tolkien à Moorcock, en passant par Leiber, les échanges entre potes nous ont permis de découvrir un grand pan de la littérature fantastique.
Comment avez-vous découvert le jeu de rôle ?
A la fin des années 70, j'étais abonné à "Jeux & Stratégie". Ils avait sorti un dossier concernant ces jeux nouveaux, venus d'Outre Atlantique. Le principe m'a tout de suite ébloui : passer la soirée entre potes à se raconter des histoires, à se faire un film... Le groupe d'amis très proches qui m'entourait a immédiatement adhéré, et nous nous sommes lancés dans une longue suite de nuits sans fin, durant lesquelles nous avons voyagé dans le temps et l'espace. Nous sommes passé par D&D, l'excellent Dragon Quest (malheureusement disparu), et rapidement je me suis retrouvé avec les règles d'AdC dans les griffes... Ça a été une véritable révélation !
Jouez-vous encore souvent ? Si oui, qu'avec des "pointures" ?
Non, malheureusement ! Le temps est devenu une denrée rare... Ce n'est pourtant pas l'envie qui manque.
"Pointures" ? Qu'appelez-vous "pointures" ? En créant Nightmare, je n'ai joué qu'avec des joueurs exceptionnels !
En quoi a constitué votre premier "job" sur l'AdC ?
J'ai traduit un scénario pour Jeux Descartes, il me semble...
Travaillez-vous seul ?
Quasiment jamais... Que ce soit dans ma profession "officielle", et plus encore lorsque j'ai écrit Nightmare. Comment écrire sans passer par l'épreuve du test avec des joueurs ? En ce qui concerne Nightmare Agency, les joueurs ont eu leur mot à dire et ne s'en sont jamais privé...
Écrivez-vous autre chose que du matériel pour jeu de rôles ? (romans, scripts de ciné)
Bien sûr ! Il m'est arrivé de pondre quelques articles ici ou là, mais le gros de ma production écrite est théâtrale. Je me suis frotté au scénar de courts-métrages, et à divers exercices d'écriture.
Connaissez-vous bien Sandy Petersen ? Avez-vous des contacts avec lui ? Et avec d'autres auteurs américains travaillant sur l'Appel (Keith Herber) ?
Je n'ai rencontré Sandy Petersen qu'une fois, dans les années 80 au Salon des jeux de Paris, en compagnie de Jean Balcezak. A l'époque, il m'avait signé une épreuve de Nightmare Agency qui venait d'être refusée par Jeux Descartes... Le principe lui avait plu, et il n'avait pas été avare en questions.
Et maintenant, êtes-vous toujours impliqué dans la production cthulhesque française ?
Plus du tout...
Comment s'est passée la parution de votre recueil chez Descartes ?
En plusieurs étapes.
La première présentation de Nightmare Agency à l'éditeur, au début des années 80, n'a pas retenu son attention.
Quelques temps plus tard, Gilles Domingo (Jason Mellyson et auteur de la plupart des illustrations) a fait l'acquisition de l'un des premiers Mac Intosh. Il s'est alors mis en tête de maquetter Nightmare à la sauce Descartes. Le résultat fut brillant et nous étions tous très fiers de posséder un supplément "apocryphe".
L'une des épreuve de cette version a été envoyée à Jeux Descartes qui nous a contactés pour nous annoncer son intention de publier la "chose".
Il a fallu ensuite revoir la maquette qui ne correspondait pas exactement au cahier des charges imposé par l'éditeur, et accepter une couverture qui ne m'a jamais plu.
Les relations avec l'éditeur en sont restées là...
Votre avis sur les productions françaises ?
Je ne suis malheureusement plus suffisamment dans le coup pour avoir un avis, mais le supplément "Guide des Années Folles" reste, pour moi, la meilleure production jamais éditée !
Votre avis sur les dernières productions (Delta Green et autres productions de chez Pagan Publishing) ?
S'il vous plait... virez cette lampe de mon visage... et desserrez les pinces, j'vais avoir des marques aux poignets...J'vous dis qu'j'suis plus dans l'coup !...
Vous seriez un monstre du mythe, lequel ?
Un humain... Les pires !...
A combien estimez-vous votre SAN ?
Non !... Pas le détecteur de mensonge !... Pas le penthotal !... Naoooooon ! ! !...

L'Appel

Quelles sont selon vous les qualités d'un bon scénario cthulhesque ? (Quel est votre préféré ?)
Une intrigue bien ficelée, ça va de soi.
Des PNJ détaillés, agréables à interpréter par le Gardien, et surprenants à rencontrer pour les joueurs...
Et de l'action, bien évidemment ! Mais subtilement dosée...
Les années 20 et 30 sont une mine de renseignements et d'appels au voyage. J'apprécie lorsque les joueurs finissent une partie en ayant été immergés dans l'Histoire, la Géopolitique et la Sociologie de l'époque.
Mon scénario (campagne) préféré ? Sans hésitation : Les Masques de Nyarlathotep !
Quelles sont selon vous les qualités d'un Gardien des arcanes ?
La première est de laisser croire aux joueurs qu'ils sont maîtres de la situation, qu'ils décident de tout, qu'ils sont presque en train de ré-écrire le scénario... Une grande dose d'humilité donc, qui cache l'individu monstrueusement machiavélique qu'il est, au fond de lui...
Mais il doit aussi plonger ses joueurs dans l'ambiance des différents scénarii et faire preuve de talents de comédien (souvent improvisateur) et de metteur en scène.
Quelles sont selon vous les qualités d'un Investigateur ?
Sans hésitation, un background qui tient la route ! Tout part de là. Le plaisir d'incarner un personnage passe avant tout par une définition la plus précise de ce qui l'anime, et ce qui fait qu'il est ce qu'il est, au moment de l'aventure. Ça donne du "matériel" au Gardien, et implique le joueur dans le Roleplaying.
Quelles sont selon vous les qualités d'un bon méchant sectateur ?
Sa discrétion ! Une petite vieille qui donne à manger à des pigeons peut-être mille fois plus flippante qu'un lourdaud bardé de signes cabalistiques...
Jouez-vous ou jouiez-vous avec de la musique et des bougies ?
Tout le temps ! La musique est très importante (les silences aussi...).
Avec Nightmare, elle était un élément de jeu. Nous ne pouvions jouer des situations au Coffeen's, par exemple, sans écouter King Oliver, Cab Calloway, Ellington, Earl Hines, Bessy Smith, etc. Pour les scènes d'action ou de suspens, l'excellente BO de Gothic, les œuvres de Bernard Hermann, Gustav Holst, etc.
Le décorum est aussi important ! Une vieille maison isolée, un soir de tempête, constitue un gage de réussite certain, surtout si une panne d'électricité vous est offerte par les Grands Anciens... Il nous est arrivé (je peux le dire maintenant, il y a prescription) de jouer certains passages de la seconde campagne de Nightmare dans un local de cheminots, au milieu d'un centre de triage, plusieurs nuits durant. Ce fut assez épique et flippant...
Étiez-vous plutôt joueur ou maître ?
Maître, à presque 100%... Concevant les scénarii, il fallait bien que je les fasse jouer. J'ai créé le personnage d'Harry Steck que j'ai interprété une ou deux fois à ses "débuts". Mais mes petits "copains" m'ont bien fait payer tout ce que je leur avait infligé en tant que Gardien...
Si vous étiez maître, plutôt conteur, action, tueur, angoissant ?
Plutôt tout à la fois... Pour tenir une équipe de fidèles joueurs en haleine, il ne faut jamais qu'ils s'attendent à votre façon de maîtriser. Le plus important était que tous se fassent le même film, au même moment, et que tous y participent.
Et avez-vous fait jouer, comme tout Maître des Arcanes débutant, la Maison Corbitt ?
Bien sûr ! Un must !
Que pensez-vous de l'Avenir du jdr, surtout en France ?
Tant qu'il y aura des passionnés, le JdR a un avenir. Le truc qui me donne de l'espoir, c'est que pour une partie de jeux de rôle, on n'a pas besoin de grand chose : une pièce, une table (même basse...), quelques dés, de quoi écrire (le minimum), une bande de potes, et c'est parti pour un voyage extraordinaire.
Autant de plaisir et d'enrichissement pour si peu d'investissement... étonnant que "certains" n'aient pas encore eu l'idée de trouver un moyen de taxer ce bonheur !...
Comment voyez-vous l'évolution des productions rôlistiques avec Internet ?
Se passer de l'outil informatique et du Net, aujourd'hui ? Autant revenir au papyrus et aux tablettes d'argile !
Votre pire souvenir de partie ?
En tant que Gardien : un scénario mijoté aux petits oignons (pour la seconde campagne de Nightmare) que les joueurs ont jeté aux orties au bout d'un quart d'heure...
En tant que joueur : je ne me souviens que des bons moments.
Votre meilleur souvenir de partie ?
En tant que Gardien : le même que précédemment, mais quelques minutes plus tard... J'ai du improviser toute la soirée et toute la nuit. Sans m'étendre, l'enquête devait se dérouler à Paris mais les "détectives" en ont décidé autrement. Ce soir-là, ils m'ont donné une grande leçon de conception et de ré-écriture de scénarii en groupe... "La Maison Van Laden" reste également un immense souvenir de partie culte !
En tant que joueur : j'ai très peu été joueur avec AdC, mais l'un de mon plus gros flip est certainement "La Maison Corbitt".
Votre perso fétiche ?
Harry Steck. J'ai forcément un faible pour le personnage que j'ai créé dans le contexte "Nightmare Agency"... Les deux joueurs principaux qui l'ont ensuite fait évoluer, lors des séances de création, ont été fabuleux et nous ont offert des fou-rires mémorables !
Sinon, le grand Chuck Byrne, évidemment ! Un régal à interpréter en PNJ : le garant des "valeurs" de Nightmare, le phare dans la brume cthulhoïde, le solo de sax dans la cacophonie du big-band, le coup de gueule dans l'éclat de rire général... Une teigne de première !
Question subsidiaire : un Investigateur fatigué (4 points de vie), un peu troublé (perte de 15 points de SAN depuis le début), trottine tranquillement (sprinte) dans une vaste grotte (une gigantesque caverne) au milieu d'une foule bigarrée (plusieurs centaines d'adeptes déments presque nus entrain d'accomplir des rites ignobles) pour aller discuter de l'organisation de la soirée avec l'hôte (pour flinguer le grand prêtre avec son calibre .38). Mais trop tard, notre malheureux compère voit arriver Nyarlathotep version Langue Sanglante par un puits sans fond au milieu de la salle. comment décririez-vous la suite ?
Asseyez-vous... Eteignez la lumière... Fermez les yeux... Détendez-vous... Vous n'entendez plus que ma voix et uniquement ma voix...
L'Appel de Cthulhu 7e Édition est copyright © 1981, 1983, 1992, 1993, 1995, 1998, 1999, 2001, 2004, 2005, 2015 de Chaosium Inc.; tous droits réservés. L'Appel de Cthulhu est publié par Chaosium Inc. « Chaosium Inc. » et « L'Appel de Cthulhu » sont des marques déposées de Chaosium Inc. Édition française par Edge Entertainment.
Merci à Monsieur Sandy Petersen !
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